vendredi 24 mai 2019

Olivier Clerc, La grenouille dans la marmite d'eau: sommes-nous déjà à moitié cuits ?

    "Imaginez une marmite remplie d'eau froide, dans laquelle nage tranquillement une grenouille. Le feu  est allumé sous la marmite. L'eau chauffe doucement. Elle est bientôt tiède. La grenouille trouve cela plutôt agréable et continue de nager.
    La température commence à grimper. L'eau est chaude. C'est un peu plus que n'apprécie la grenouille, mais elle ne s'affole pas pour autant, surtout que la chaleur tend  à la fatiguer et à l'engourdir.
   L'eau est vraiment chaude, maintenant. La grenouille commence à trouver cela désagréable, mais elle est aussi affaiblie, alors elle supporte, elle s'efforce de s'adapter et ne fait rien.
   La température de l'eau va ainsi continuer de monter progressivement, sans changement brusque, jusqu'au moment où la grenouille va tout simplement finir par cuire et mourir, sans jamais s'être extraite de la marmite.
   Plongée d'un coup dans une marmite à 50°, la même grenouille donnerait immédiatement un coup de patte salutaire et se retrouverait dehors.

   Cette expérience est riche d'enseignements. Elle nous montre qu'une détérioration suffisamment lente échappe à notre conscience et ne suscite la plupart du temps pas de réaction, pas d'opposition, pas de révolte de notre part."

Et l'auteur de citer, comme premier exemple (il y en a plusieurs autres dans le livre), la santé :
  
   "Certaines maladies mettent ainsi dix, vingt ou trente ans à se mettre lentement en place, le temps que notre corps et notre psyché parviennent à saturation de toxines, de tensions, de blocages, de non-dits, de refoulements. Notre accoutumance à certains désagréments mineurs, ajoutée à la perte de sensibilité et de vitalité, fait que nous ne réagissons pas à cet insensible affaiblissement de notre santé avant que n'apparaissent des pathologies plus profondes, plus graves, plus lourdes à traiter."

Lire ce livre, plein de métaphores et d'allégories, peut s'avérer salutaire à une époque, comme l'écrit Olivier Clerc, "où l'esprit analytique règne en maître, favorisant l'individualisme forcené, la fragmentation sociale, la réduction du monde à des chiffres, à des statistiques et des données sans vie."

Olivier Clerc, La grenouille qui ne savait pas qu'elle était cuite et autres leçons de vie, JC Lattès, 2005, p. 15-17

mercredi 22 mai 2019

James Baldwin

"Dans ces essais écrits durant les années 1940 et 1950 alors qu'il n'avait qu'une vingtaine d'années, James Baldwin s'interroge sur ce que signifie être noir aux Etats-Unis. Ses réflexions sur la vie à Harlem, la politique, la religion, la presse, la littérature ou le cinéma, écrites dans une prose riche, dense et percutante, sont d'une profonde et vibrante actualité.

La force de ce recueil réside dans la virtuosité avec laquelle Baldwin entremêle sa critique d'une société injuste et clivante, et le récit très personnel de son expérience et de ses souvenirs. L'évocation de la mort de son père, figure insondable d'un pasteur guetté par la démence, l'entraine à commenter les émeutes de 1943 à Harlem ; le témoignage de son emprisonnement injustifié dans la prison de Fresnes le conduit à poser un regard lucide sur le rapport de la France à la colonisation ; la chronique d'un voyage à Atlanta lui donne l'occasion de dénoncer le racisme systémique et le paternalisme des politiques qui infantilisent la communauté noire. Avec une justesse incomparable et une franchise désarmante, il détaille ainsi les comportements, explore des méandres des relations entre les Noirs et les Blancs et donne à voir une société aux prises avec ses contradictions.

Cette nouvelle traduction rend admirablement justice à l'intensité, la finesse et la perspicacité de l'œuvre de Baldwin, et permet de redécouvrir la voix unique d'une des figures les plus brillantes du XXsiècle."

James Baldwin, Chroniques d'un enfant du pays, Gallimard, 2019, quatrième de couverture.

NB : je reviendrai bientôt sur ce livre pour livrer mes impressions de lecteur.

Quoi de neuf sur le blog ?

Autrefois hébergé par Google+, le blog n'avait plus de fournisseur officiel depuis fin mars et n'était donc plus sécurisé. De fait, je n'avais qu'à basculer sur Blogger pour fonctionner à nouveau normalement. C'est chose faite depuis la semaine dernière, grâce à l'aide technique d'un ami.

Tout cela n'explique pas pourquoi je publie moins sur le blog, la dernière fois que je suis intervenu ici c'était en novembre 2018! Je sais, je crois savoir ce qui s'est passé. J'ai privilégié —non, ce n'est pas exact, il ne s'agit pas d'un acte délibéré —, j'ai cédé plutôt, comme un somnambule, à la facilité inhérente aux réseaux sociaux: un post vite fait, presque tous les jours, sinon plusieurs fois par jour sur Facebook ! Liker, pour montrer mon soutien, mon appréciation "j'aime", par exemple ! Geste mécanique, sans affect, souvent, dans l'espoir implicite qu'on me rende la pareille, tout pour nourrir l'égo jamais rassasié ? Bon, bien sûr, il y a des amis (es) qu'on aime retrouver, je parle de vrais amis qu'on connait de visu de longue date et aussi d'autres plus récents rencontrés sur fb, qui pensent, questionnent et ouvrent sur autre chose que le sensationnel ou l'émotionnel ou les critiques systématiques sur tout ce qui ne va pas dans leur sens !
 Peu de pensée vraiment personnelle. Normal, sur fb, pas de temps à perdre, le texte ne doit surtout pas excéder quelques lignes pour espérer être lu, et puis la cadence très tenue, le côté éphémère, aussitôt publié aussitôt oublié. Normal.

Alors vient un moment, et c'est maintenant, où je me dis stop, ou plutôt ressaisissement, reprise de l'élan initial, retour dans cet espace libre, disponible pour penser, rêver, chercher, écrire!

Quant à fb, sans bouder le réseau, —est-ce possible à l'heure du tout numérique ?—revenir à mes premières intentions : n'y publier dans la mesure du possible que des citations ou de brèves recensions de livres, quelques photos prises sur le vif de l'actualité.

 Nous sommes au téléphone depuis une dizaine de minutes, je ne suis pas du tout à l'aise : —Attends s’il te plaît, lui dis-je, donne-moi...