"Celui qui questionne est toujours repris dans la question, il est concerné par l'interrogation et par cela même qui est interrogé."
Martin Heidegger, Les concepts fondamentaux de la métaphysique. Monde.finitude.solitude, Gallimard, 1992, p.272
"Celui qui questionne est toujours repris dans la question, il est concerné par l'interrogation et par cela même qui est interrogé."
Martin Heidegger, Les concepts fondamentaux de la métaphysique. Monde.finitude.solitude, Gallimard, 1992, p.272
"Le livre est un morceau de silence dans les mains du lecteur. Celui qui écrit se tait. Celui qui lit ne rompt pas le silence."
Pascal Quignard
Il fit semblant de ne pas comprendre.
A l'expression de son visage, elle se demanda ce qui les rendait ainsi étrangers l'un à l'autre. Elle crut bon de le lui dire, mais elle le dit sur un ton qui—elle s'en rendit compte à l'instant même où elle reprit la parole — allait creuser encore d'avantage le fossé déjà profond entre eux.
Il la regardait. De l'air de quelqu'un qui veut se persuader qu'il ne comprend pas ce qui se passe. Son malheur est qu'il comprenait, au contraire. Et que ce n'était la faute ni de l'un ni de l'autre, c'est comme cela que cela se passe, comme cela depuis des années, depuis qu'ils ont renoncé à se parler, c'est-à-dire depuis qu'ils n'entendent plus le silence des mots, de ce qu'on n'entend plus par usure.
NB: je remercie mon amie Christiane Veschambre, écrivaine, elle anime chez elle depuis des années "Un temps à soi pour écrire", des ateliers d'écriture une fois par mois. Je participe à celui de samedi après-midi. Au cours de la dernière rencontre, Christiane nous a lu un extrait du dernier livre de Pascal Quignard "L'homme aux trois lettres", pour nous inciter à notre tour à aller librement dans l'exploration de ce qui vient, et ce qui est venu pour moi c'est le texte que vous venez de lire, à vrai dire j'en ai écrit deux, je publierai l'autre (encore plus court) ici bientôt. Une phrase de Guignard a en particulier accompagné ce temps à soi pour écrire : "Ecrire c'est lire ce qu'on ne voit pas dans le silence de ce qu'on n'entend plus."
Je suis avec cette phrase
croisée je ne sais où
depuis elle me suit partout
j'ai beau tourner
à droite à gauche
entrer sortir
ralentir courir …
toujours à mes trousses
de fatigue
elle ne souffre
et maintenant
carrément
comme chez elle
installée
elle fait corps
elle est moi :
—le remède à la gêne c'est se dévoiler,
y être totalement !
ah ben alors
tout ça pour ça…?
"Ce ne sont pas les ennemis, mais les amis qui condamnent l'homme à la solitude."
Milan Kundera
Il n'y a pas de bout de la nuit
seulement une maison vide
et silencieuse de tous ses murs
on est dedans
pas en prison
mais dedans
et la nuit comme aveugle
tourne en rond
les mots piochent piquent
des étoiles
on dira ça comme ça
des lumières fermées
tension
ce silence qui vient de biais si l'on n'agit pas c'est lui qui va emporter la mise la main les mots dans l'ardoise et plus rien
pas facile d'aller contre l'aigu du silence dans la maison vide il siffle comme chez lui il sape il pèse ensuite habitué qu'il est du lieu
une lame de nuit
tension sans l'avoir vue venir — vite glisser — tension — nerfs cordes mais quelle musique grommellement de mots pour rien ce bruit de chien grondant comme pour intimider le silence dessous qui passe
continuer à parler — rester dans le blanc de la lampe plutôt que la nuit qui tait la maison tait tout
un bruit d'eau presque rassure dans la gouttière
on tient à peu [...]
Nous sommes au téléphone depuis une dizaine de minutes, je ne suis pas du tout à l'aise : —Attends s’il te plaît, lui dis-je, donne-moi...